MEDICINE HAT: Firebird (2017)

Depuis l’album qui l’a fait exploser sur la scène sudiste (From Nowhere To Here en 2006), la formule de ce groupe est bien connue. Mené par leur leader et frontman Mark Jackson, son style puissant et tourbillonnant est basé sur une rythmique musclée et très dynamique, et sur le travail complémentaire de deux guitares principales, une couvrant le spectre allant du honky-tonk au shredder, avec plutôt un son de Gibson, l’autre se chargeant d’un éventail compris entre bluegrass et country-rock musclé, plutôt avec un son de Fender, quelquefois soutenues par la guitare acoustique de Mark qui assume le chant principal. Une des guitares se doit bien sûr d’être celle du producteur… Chris Borsberry succède donc à Steve Loveday dans le rôle. La formule semble avoir fait ses preuves pour Mark Jackson, et nous n’allons pas nous en plaindre compte-tenu de la qualité des précédents opus du groupe.
Mais là nous avons pour la première fois depuis longtemps droit à un album complet du gang, qui plus est avec une équipe complètement différente de celle qui avait officié lors du dernier LP. Par contre, et c’est assez logique, c’est exactement celle qui a enregistré le single « Country Song »/« Sin City » paru il y a deux ans. On pourra certes arguer que les nouveautés de cet album ne sont pas si nombreuses pour ceux qui avaient déjà le single de 2015 et le EP de 2014, mais les temps sont durs. Même pour un groupe de grande qualité comme Medicine Hat, qui n’est pas le plus connu des foules, les enregistrements se font au compte-gouttes après avoir sué sang et eau sur scène pour financer un enregistrement. Alors, si ce CD de seulement 9 titres sort cette année, comme je l’avais appelé de mes vœux dans ma chronique de 2015, on peut ranger à priori l’événement parmi les bonnes nouvelles, en espérant que les nouveaux titres vont tenir le rang des morceaux déjà connus.
Penchons-nous donc sur ce nouvel opus, qui démarre d’emblée très fort au son d’un V8 bodybuildé. Le morceau inédit dont l’album tire son nom (non, il ne s’agit pas de la guitare!) donne le ton : du rock puissant typique du groupe où le gosier de Mark s’exprime pleinement. « License to farm », connu en version live sur le EP en public du même nom datant de 2009, enchaîne dans le genre country-rock survitaminé avec guitares en harmonie : certains ont appelé ça du rock sudiste ! Côté solo pur et dur, Chris Borsberry enfile des guirlandes de notes d’inspiration country avant que Steve Gough prenne le relais, histoire de marquer l’opposition des styles. Bref mais intense ! « Heart’s gone crazy », figurant déjà dans le EP de 2014, calme un tantinet le jeu avec son intro à la guitare acoustique et déroule sans mièvrerie sa mélodie puisée au sein de l’univers des ballades country, avant que les guitaristes ne mettent le feu aux poudres. Toujours de la guitare acoustique en intro sur « Mind of a man », un nouveau titre où Mark fait sa grosse voix, et on se doute que l’on ne va pas rester longtemps en contrée calme. Le ton se fait plus menaçant, Jon Brown impose une ligne de basse au son monstrueux. Steve Gough fait siffler sa guitare en larsen, Chris Borsberry se fend d’un solo exaspéré qui rajoute à la tension : Medicine Hat sait aussi explorer de nouveaux angles d’attaque musicaux. À peine l’esprit d’un homme expédié, le groupe repart en pétaradant sur un « Long Way Back Again » figurant déjà avec bonheur sur le EP de 2014. On y retrouve complètement le souffle puissant et mélodique du Medecine Hat de 2006. Le petit break du milieu avec un petit côté Who, orné par Chris Borsberry permet à Steve Gough de s’envoler sur un solo incorporant au passage deux doigts de shred. Toujours aussi impressionnant ! La coda prend appui sur ce refrain qui sent les grands espaces, les highways dans le désert, la furie du vent qui tourbillonne et qui nous emporte avec lui. Carton assuré ! Ce cœur de CD s’avère particulièrement redoutable puisque nous retrouvons ensuite avec plaisir « Country Song », le tout aussi puissant titre phare du single de 2015, aux arrangements toujours fouillés, avec sa rythmique entêtante et ses notes de banjo sur le refrain. L’album se termine par deux titres du EP de 2014, le boogie saignant « Huntin’ For Fun » et le fiévreux « Fire In Muskogee » qui clôt l’album en beauté, séparés par une reprise d’AC/DC. Ô surprise, pas de « Sin City » qui figurait en soutien de « Country Song » sur le single de 2015, mais un « Bad Boy Boogie » salement envoyé, malgré le son un peu trop métallique de la batterie. Ce titre permet l’expression de tourbillon permanent qui semble bien être la marque de fabrique de Medicine Hat. Mark Jackson a parfaitement su s’approprier le morceau sans rien lui retirer de son caractère. On peut d’ailleurs souligner son chant absolument remarquable tout au long de l’album, dans un style qui lui est propre et immédiatement reconnaissable : en voilà un à qui il faudra peut-être penser lors de certain référendum...
Avouez qu’il aurait été dommage de ne pas réunir sur un album ces titres jusqu’ici éparpillés ou inédits, car le plaisir d’écoute ne se dément pas. Par contre, on peut vivement regretter qu’un tel groupe n’ait visiblement pas les moyens de ses ambitions : malgré la qualité du travail fourni, il manque un tout petit quelque chose, dans la production, dans le mixage, dans la pochette qui laisse penser qu’avec un investissement financier à la hauteur, nous aurions pu avoir un album marquant d’une douzaine de titres avec un livret de pochette autrement plus complet et plus valorisant. Mais que voulez-vous… L’important n’est-il pas que des artistes de cette trempe aient toujours les moyens et la volonté de s’exprimer et que le fruit de leur labeur et de leur acharnement à faire vivre cette musique procure toujours autant de plaisir à l’écoute ? Alors ne boudez pas ce plaisir et précipitez-vous sur cet album : en plus de réjouir vos oreilles, vous ferez l’excellente action de soutenir de vrais musiciens !

Y. Philippot-Degand


Medicine Hat avait déjà sorti un mini CD de quatre titres il y a quelques années. Là, il revient avec un disque qui va réveiller tous les « Southern rockers » endormis et anesthésiés par le manque de productions actuelles concernant ce courant musical qui nous est cher. Dès les premières notes, on constate que le groupe a conservé la forme et fait toujours preuve d’une haute maîtrise technique, particulièrement les deux guitaristes qui s’expriment chacun dans un registre différent (hard/southern rock pour l’un, country-rock pour l’autre). Les musiciens ont choisi de reprendre les quatre morceaux déjà parus sur l’album précédent mais avec des arrangements différents. La ballade « Heart’s gone crazy » (avec un superbe solo mi country, mi sudiste), « Long way back again » (qui possède un petit côté à la Bryan Adams et n’hésite pas à marier des phrases country sur les couplets à un superbe solo hard mélodique), « Huntin’ for fun » (qui comporte un solo country en son clair et un solo hard saturé à souhait) et le country-rock speedé « Fire in Muskoge » qui allie une rythmique infernale proche de Motorhead et deux grattes aux styles différents (country et hard rock). Les autres titres valent aussi le détour. L’ambiance sudiste plane sur « Firebird », un morceau au tempo médium dans le style du New Lynyrd Skynyrd avec un bon solo de guitare. Le rock « Licence to farm » cartonne bien avec un thème à la tierce entraînant et un excellent solo country-rock en son clair suivi d’un break en son saturé. « Mind of a man », pourvu d’un très bon solo de six-cordes, se défend bien également. Mais l’album contient encore deux bonnes surprises. Pour commencer, du country-rock musclé à la Hank Williams Junior avec « Country song » et son solo country exécuté au string bender (petit appareil rajouté au dos d’une guitare, généralement une Telecaster, qui permet de jouer sur la tension des cordes et de se rapprocher des sonorités d’une pedal steel). Ensuite, du bon rock costaud qui déchire avec « Bad boy boogie » (doté d’un solo « killer »). Très fort ! Pas la peine d’en écrire davantage ! Les gars de Medicine Hat ont cartonné avec ce disque revigorant qui pète le feu ! Rock’n’Roll is great !

Olivier Aubry